17 octobre 2007

« Magnus » de Sylvie Germain

« Magnus est un ourson de taille moyenne, au pelage très râpé, marron clair faiblement orangé par endroits. Il émane de lui une imperceptible odeur de roussi et de larmes.
Ses yeux sont singuliers, ils ont la forme et le doré - un peu fané - de la corolle de renoncules, ce qui donne un regard doux, embué d’étonnement. »

« Magnus est un homme d’une trentaine d’année, de taille moyenne, aux épaules massives, au visage taillé à la serpe. Il émane de lui une impression de puissance et de lassitude.
Ses yeux, brun mordoré virant parfois à l’ambre jaune, sont enfoncés dans l’ombre des orbites, ce qui lui donne un regard singulier - de rêveur en sentinelle »

« Magnus », paru pour la première fois en 2005, a obtenu le prix Goncourt des Lycéens. Cette histoire a la saveur d’un conte, d’une longue rêverie, mais aussi une remise en question sur la mémoire.

C’est l’histoire d’un enfant, Franz-Georg, né avant la seconde guerre mondiale. De sa prime enfance, il n’a aucun souvenir. Seuls sont conservés ceux vécus après ces 5 ans. Les souvenirs d’une vie de fuite. Les souvenirs d’une mère tellement attachée à son enfant, pour mieux le délaisser quelques années plus tard. Les souvenirs d’un père trop souvent absent, et qui, lorsqu’il rentre à la maison, ne lui montre aucune forme d’affection.
Pour Franz-Georg, Magnus, son ours en peluche, est son seul confident et le témoin dans sa quête d’identité. Car il va lui falloir tout réapprendre. Sa mémoire ne serait que mensonges. Toute sa vie Franz-Georg va partir à la recherche de ses 5 premières années pour comprendre qui il est réellement, pour combler le trou noir de son enfance.

« Magnus » est construit comme un long monologue intérieur. Chaque phrase est poésie, chaque mot choisi avec soin pour sa sonorité. Sylvie Germain met en avant l’expression des sentiments, le conflit interne que vit le héros à travers ses pensées et ses questionnements.
Le découpage des chapitres y contribue, chacun est un fragment de la vie de Magnus (nom que prendra le personnage au fil de l’histoire, ne faisant plus qu’un avec son confident). Ils sont entrecoupés de séquence, notule, écho, résonances, éphéméride, des scissions dans le récit apportant explications, extraits de roman et même biographie. Un roman sous forme de puzzle où chaque pièce restitue petit à petit les morceaux manquants. Et durant toute la lecture nous suivons le héros, son cheminement dans les méandres de la mémoire fragmentée.
En plus d’une recherche d’identité, « Magnus » c’est aussi l’évocation du mal, personnifié sous les traits du père. Une œuvre à la grâce subtile sur la douleur de la perte.

« Magnus » est une œuvre qui ne laisse pas indifférent. Tout contribue au trouble, la période historique dans laquelle le roman s’inscrit, ainsi que les souffrances de l’âme du héros. Une histoire poignante et pleine de sensibilité.



Ed. Folio – 2007

« Le Mystère des Dieux » de Bernard Werber

Au-dessus des Hommes,
Les Anges.

Au-dessus des Anges,
Les Dieux.

Au-dessus des Dieux,
?


A la fin du « Souffle des Dieux », Bernard Werber nous avait laissé sur de nombreuses portes ouvertes. Concernant la symbolique des chiffres, abordée tout au long de ce cycle, nous avions eu un aperçu du 8, et une évocation légère du 9, nous laissant sur de grandes interrogations quant à la signification de ces deux derniers chiffres. Quelles vont être les révélations de ce troisième opus ? Qui va gagner et gravir la montagne ?
Toutes les réponses sont là, dans ce nouveau tome.

Au début, la promotion comptait 144 élèves dieux. Au fur et à mesure des éliminations, le nombre d’élèves s’amoindri de plus en plus. A quelques instants de la finale ils ne sont plus qu’une poignée. Alors, qui va reporter le jeu d’Y ?

« Le Mystère des Dieux », ce roman tant attendu par les fans, tient toutes ses promesses. Dans le tome précédent, nous avions laissé Michael Pinson face à la révélation d’une deuxième montagne sur Aeden. Celle qui abriterait l’être suprême.
Au début de ce dernier tome nous retrouvons le héros à la veille de la grande finale à Olympie. L’événement qui se prépare nous laisse entrevoir la suite de l’intrigue, un élève va enfin gravir cette montagne et accéder au savoir absolu. Mais, alors que la finale vient de se jouer, nous nous retrouvons dépités. Un grand rebondissement vient changer le fil de l’intrigue, et la peur de ne finalement pas connaître le fin mot de l’histoire vient nous tenailler. Allons-nous apprendre la signification de ce 9 tant attendu ?
Malgré le changement de cap de cette aventure, nous nous laissons entraîner dans les nouvelles péripéties. Les lignes défilent, l’espoir renaît, et nous arrivons enfin au dénouement…
Je ne souhaite pas vous en dire trop. Si je révèle ne serait-ce qu’un élément cela enlèvera tout le charme de ce roman. Tout ce que je peux vous dire, c’est que oui nous apprenons la signification du 9, mais aussi du 10. Et au-dessus du 10 ?..

« Le Mystère des Dieux » clôture magnifiquement la trilogie. Une nouvelle fois Bernard Werber nous pousse à nous questionner sur les mystères qui nous entourent, à travers une très belle histoire pleine d’émotions.
En effet, les sentiments nous assaillent. Ces personnages que nous nous étions accaparés depuis les Thanatonautes nous font vibrer. Nous ressentons leur joie, leur peine, leur frustration,... jusqu’au dénouement final. Arrivés aux dernières pages, nous sommes surpris, et… non je ne dirai pas ce qu’il se passe à la fin. Les mots me manquent pour le décrire, et les émotions ressenties à ce moment de la lecture sont très intenses ! Les dernières pages m’ont, en tout cas, fortement émue.

« Le Mystère des Dieux » est un livre sublime, envoûtant, qui nous pousse de plus en plus loin dans la réflexion. A dévorer sans attendre !



Ed. Albin Michel – 2007

14 octobre 2007

« Une Fille comme les Autres » de Jack Ketchum

Lorsqu’on vous parle d’épouvante, à quoi pensez-vous ? Au monstre planqué dans votre placard, ou sous votre lit. A la créature surnaturelle qui arpente chaque nuit les cimetières abandonnés. Au psychopathe traquant sa proie. Mais avez-vous pensé à votre voisin ?.. à la gentille ménagère que vous croisez chaque matin en allant acheter votre pain ou votre journal ?.. à toutes ces personnes qui nous entourent au quotidien et qui semblent si « normales » ?..

Depuis la mort accidentelle de leurs parents, Megan Loughlin et sa petite sœur Susan se retrouvent orphelines et sans foyer. Heureusement que tante Ruth est là pour les prendre sous sa protection. Mère célibataire, elle va héberger les deux jeunes filles en plus de ses trois fils, Woofer, Willy et Donnie.
Pour tous les gosses du quartier, la maison des Chandler est l’endroit où l’on peut que se trouver bien. Ruth est une mère peu contrariante, contrairement aux autres mamans. Une femme agréable, accueillante, pleine d’humour, et qui offre des bières en cachette aux garçons.
Mais Ruth n’est pas si « parfaite » que ça. Derrière ce portrait de femme cool avec les enfants, se cache en fait une femme aigrie. Une femme qui ne supporte pas les femmes. Qui, quelque part, se déteste elle-même.
Qui pourrait deviner dans ce calme petit quartier, que les cruautés les plus inimaginables, les pires sévices, seront perpétrés dans cette maison ? Qu’entre les murs d’un abri antiatomique, une fille comme les autres sera mise à mort.

Inspiré d’un fait divers arrivé aux Etats-Unis en 1965, « Une Fille comme les Autres » n’est pas un roman dérangeant, il est pire que ça. Jack Ketchum nous plonge certes dans l’horreur, mais une horreur ancrée dans le réel et au monde que nous côtoyons chaque jour.
Le roman démarre comme une histoire de Stephen King. C’est l’été, pour les ados du quartier ce sont enfin les vacances. Les journées se passent entre excursion au ruisseau, parties de base-ball, fêtes foraines, et le Jeu. Puis l’intrigue nous plonge petit à petit dans l’innommable. Nous savons à quel point les enfants peuvent être cruels entre eux, mais quand cette cruauté est autorisée par un adulte… Essayez seulement d’imaginer jusqu’où ils peuvent aller. La jeune Meg elle le sait, elle n’a pas besoin d’imaginer. Enchaînée dans cet abri, elle sait, elle subit, à la merci d’une bande d’adolescents qui ne se rendent plus compte de leurs actes, et d’une mère de famille qui a totalement perdu l’esprit. Cette femme alimentée par sa haine, imaginant les pires tortures dans le but de faire regretter à Meg une chose, une seule chose, celle d’être ce qu’elle est : une femme.

« Une Fille comme les Autres » ne laisse pas indifférent. Ce roman est horrible. Horrible car il dépeint des faits qui se sont passés. A la lecture nous sommes envahis par des sentiments très forts. La haine s’empare de nous, nous avons une irrésistible envie de mettre en pièce certains personnages pour leurs actes, d’autres pour leur absence de réaction. Notre frustration se fait vite sentir, et nous nous retenons de ne pas balancer le livre à travers la pièce. Qu’est ce qui nous retient ? Le besoin de savoir jusqu’où l’horreur peut aller.
Un roman très dur, difficile à supporter, qui vous entraînera au plus profond de la cruauté humaine. Comme le dit Stephen King dans sa préface : « ce roman ne se borne pas à promettre la terreur, il tient ses promesses ».



Ed. Bragelonne – 2007

13 octobre 2007

Interview de Bernard Werber

Mon baptême. Ma première fois. Je ne sais pas comment vous décrire ce... truc.
La toute première fois que je fais une interview vidéo, qui est malheureusement incomplète par manque de temps.
Je me permets toutefois de vous offrir cet instant, qui fut magique, même si le résultat est assez, comment dire, loupé. Surtout concernant la personne qui pose les questions c'est à dire moi.



Interview de Bernard Werber
envoyé par Arlis06

9 octobre 2007

Festival du Livre - Mouans Sartoux

Comme pour chaque salon auquel j’assiste, voici un petit compte rendu.
Contrairement à celui de Nancy, je n’ai pu venir que sur 2 jours, mais deux journées de pur bonheur.

Samedi 6 octobre :

Après quelques minutes de galère pour réussir à garer mon carrosse, me voilà enfin sur place ! C’est tout le centre ville qui est réquisitionné pour le salon, et c’est dans un véritable village littéraire que les passionnés se retrouvent.
Un petit tour vite fait dans la partie roman pour repérer les stands des amis, et récupérer quelques renseignements, me voilà repartie pour le cinéma « La Strada » où dans quelques minutes va se dérouler la conférence de Marc Levy. 50 minutes magiques, consacrées surtout à un dialogue entre l’auteur et ses lecteurs. Certains d’entre eux nous offrirons des instants d’intense émotion.

Marc Levy durant la conférence


La conférence à peine terminée, nous nous retrouvons tous devant le cinéma où Marc doit se prêter au jeu des dédicaces. La file est déjà importante, mais nous passons un petit moment à discuter avec l’auteur. Pour notre plus grand plaisir !




Les dédicaces s’enchaînent assez vite, Marc prend tout de même le temps de discuter avec chacun et de prendre les photos.
Je tiens à remercier les personnes qui viennent dans ce type de manifestation pour râler… Je suis désolée, mais nous autres passionnés aimons partager et discuter avec les écrivains qui nous font vibrer le temps d’une lecture. Donc des fois ça peut prendre un peu de temps. Si ça ne vous conviens pas, la prochaine fois restez chez-vous. Voilà c’était mon petit coup de gueule.

Mon tour étant passé, je file vite vite au gymnase pour retrouver mes chouchous Bernard et Daniel J. Bernard Werber est déjà en plein boulot, enchaînant dédicace sur dédicace. On prend tout de même le temps de discuter un peu entre deux signatures, du coup Daniel en profite pour nous prendre en photo. Finalement je laisse Bernard bosser, pas envie de ralentir la file (et de faire râler les gens, oui oui toujours les mêmes) et je vais voir Daniel qui a lui aussi pas mal de clients. Je suis contente que son premier roman marche si bien !

Bernard Werber

Daniel Angelo

Encore un petit tour dans le gymnase. Je retrouve M. Joseph Giudiciani, rencontré lors des nocturnes. Puis je fais la connaissance de Gordon Zola, auteur de thriller comique, dont j’avais entendu parler sur le forum Plume Libre.
La journée touche bientôt à sa fin. Je retourne donc retrouver mes amis. Bernard s’en va et me donne rendez-vous à 11h le lendemain, au passage il me demande si je ne devais pas l’interviewer… le lendemain justement… « Ben en fait là comme ça à brûle pourpoint... non, je n'ai rien préparé, mais je peux voir pour envoyer une interview par mail ! Ce sera bien non ? »
Mais c'est tellement mieux de vive voix. A ce moment de la journée je me suis dis … « Je peux interviewer Bernard Werber et j’ai rien de prêt, je suis dans la m..... !!!!! Mais c’est la super occasion à ne pas rater !!!!! ».
Je n’ai pas vu le retour, tellement perdue dans mes pensées et cette interview à préparer le soir même.


Dimanche 7 octobre :

La nuit fut courte. Réveil un peu difficile à 8h, je me motive pour être prête à temps et partir au plus tard à 10h de chez moi. Et là le stress monte, monte, monte…
La veille ce fut un peu galère pour se garer, en ce dimanche matin c’est pire ! J’ai passé plus d’une heure à tourner dans le village en quête d’une place !!!! Du coup j’arrive à la bourre.
Daniel m’attendais devant le gymnase depuis un moment. Le pauvre je l’ai fait revenir exprès car je n’avais pas de caméraman pour l’interview. Mais pas de Bernard en vu. Finalement il à l'air à la bourre lui aussi.
Vers midi nous sortons tous les trois du gymnase pour prendre un peu l’air, et c’est parti pour mon baptême. Malheureusement je ne pourrai poser que les premières questions, Bernard est vite rappelé par son attaché de presse. L’heure tourne, il faut aller manger puis à 14h il y a la conférence.
Avec Daniel nous partons de notre côté pour nous sustenter. Mes parents nous rejoignent. Nous avalons un déjeuné en deux deux, pas le temps de prendre un dessert que c’est reparti. Direction le cinéma.
La conférence de Bernard vient juste de commencer. Vite je file me mettre sur l’estrade pour tout filmer.
Comme pour Marc, cette conférence est vraiment très intéressante, et se passe comme celle de la veille. A la fin nous nous dirigeons vers la sortie et les dédicaces. J’ai à ce moment encore un espoir pour finir mon interview. Bernard me propose de m’installer à côté de lui pour la continuer, mais je préfère le laisser tranquille, l’interview ne serait vraiment pas faite dans les meilleures conditions.
Alors que j’attends sur le côté que la séance soit finie, un organisateur vient m’annoncer que Bernard s’en va à 16h15 pour prendre son avion. Il ne reste même pas une heure avant son départ. Finalement, je n’arriverai pas à terminer ce que j’avais commencé, je vais me mettre dans la file pour au moins faire dédicacer les livres du jour et prendre encore quelques photos. Tant pis pour l’interview, ce n’est que partie remise, et là j’aurai plus de temps pour la préparer.



Juste le temps de se dire au revoir et le voilà parti. Promis Bernard je monterai bientôt à Paris, et puis entre temps je vais venir à Brive-la-Gaillarde, ça y est c’est décidé.

Avec mes parents nous retournons au gymnase pour retrouver Daniel. Un dernier tour des stands, encore quelques photos, et le salon de Mouans Sartoux s’achève.


Merci à vous tous. J’ai encore une fois passé un week-end merveilleux en votre compagnie. Vous allez affreusement me manquer, mais à la fin du mois c’est sûr, je retourne en salon.

Merci Marc pour vos compliments et encouragements.
Merci Bernard pour ta présence et ta gentillesse.
Merci Daniel, tu as vraiment un coeur en or, et revenir le dimanche juste parce qu'il me manquait un caméraman me touche énormément.

Merci, merci, merci, merci !!!!!!

Pour le plaisir en voici encore ! ;)

Gordon Zola

Joseph Giudiciani

Daniel Angelo




7 octobre 2007

« Glissement de Temps sur Mars » de Philip K. Dick

Le domaine de la science-fiction m’était jusque là quasiment inconnu. Le côté trop futuriste me gênait. Et pourtant, je me lance enfin et plonge avec délice dans l'univers de Philip K. Dick.
Philip K. Dick était une sorte de génie visionnaire, et pour preuve ce roman, qui lu 40 ans après sa rédaction laisse une drôle d’impression. L’auteur est aujourd’hui une icône pour les amateurs de SF ainsi que pour de nombreux écrivains.

La Terre est surpeuplée, elle est devenue invivable. Petit à petit les terriens se tournent vers Mars. Y créant de nouvelles colonies. A l’opposé de la Terre ils se laissent séduire par le vide de la quatrième planète. Seulement l’O.N.U. contrôle tout sur Mars. Depuis un satellite, l’organisation surveille les colons, mais reste un intercesseur impuissant.
Jack Bohlen est réparateur pour la compagnie de M. Yee. Schizophrène il essaie de se guérir en réparant des machines, des doubles mécaniques humains. De par sa maladie, Jack n’arrive pas à communiquer avec les autres. Mais il va tenter de retrouver le contact avec autrui par un double infantile, Manfred Steiner.
Manfred Steiner est un jeune autiste. L’enfant est tourné vers le futur. Mais bien plus que les événements qui vont se produire, c’est sa propre décrépitude jusqu’à la mort qu’il voit. Son univers est empli de peur et de haine. Manfred s’enferme dans son monde, il n’est plus relié à la réalité qui l’entoure.
Arnie Kott, ancien plombier, est devenu la personne la plus importante sur Mars. Chef du Syndicat des plombiers, c’est lui qui contrôle la distribution de l’eau, denrée trop rare sur la planète. Il se lie facilement avec les gens, car avec le pouvoir c’est lui qui tient les rênes dans les rapports avec les autres.
Après une rencontre fortuite dans le désert, Arnie va faire appelle à Jack pour un projet un peu particulier. Le puissant homme d’affaire souhaite entrer en contact avec le jeune Manfred, car il pense que l’enfant est capable de voir l’avenir. Mais en contact avec Manfred, Jack va voir ressurgir sa propre schizophrénie.

« Glissement de Temps sur Mars » est l’aube de la période « martienne » de Philip K. Dick, qui trouve sa conclusion avec « Simulacre ». Ce livre reprend un thème favori de l’auteur qui est la difficulté de communiquer. Il utilise ici l’organisation de l’espace, et la distance Terre/Mars ainsi que leur totale opposition pour construire son récit et exprimer ce conflit émotionnel. Tout tourne autour des oppositions, chaque élément étant l’exact contrepoint de l’autre. Réel et illusions s’entrecroisent, se choquent, au point que les récits se superposent nous mettant dans un état de perturbation totale. Pour exemple, je ne citerai q’une partie de ce récit où nous avons l’impression de revivre sans cesse le même instant, comme le héros d’« Un Jour Sans Fin ».
Avec « Glissement de Temps sur Mars », Philip K. Dick nous plonge dans les méandres de l’aliénation. Seulement, à la lecture de ce roman nous prenons encore plus conscience qu’en chacun de nous réside l’opposition, et il fait ressortir ce nous-même étrangement inquiétant, tapit au fond de nous et qui ne demande qu’à ressurgir. Notre côté Mr Hyde que nous refoulons.

Si vous aimez les histoires de trouble de la personnalité, je vous conseille vivement de lire ce livre et pourquoi pas de vous lancer dans l’épopée martienne de Philip K. Dick.


Ed. Pocket – 1964

« Les Thanatonautes » de Bernard Werber

« L’homme a tout exploré : le monde de l’espace, le monde sous-marin, le monde souterrain ; seul le continent des morts lui est inconnu. »

Pour Michael Pinson, tout commence avec la mort de son arrière grand-mère Aglaé. A l’enterrement le petit Michael est incapable de verser une larme, ses parents le traitent alors d’insensible et d’égoïste. Comment appréhender la mort, alors qu’enfant il ne sait pas ce que cet instant représente. Mais c’est à partir de ce jour que Michael va chercher à la comprendre. Pourquoi génère-t-elle de telles émotions ? Et pourquoi est-ce pour les vivants un sujet tabou ?
En grandissant il va faire la connaissance de Raoul Razorback. Un jeune garçon étrange qui reste souvent assis sur la stèle de son père au cimetière du Père Lachaise. Il attend que le défunt, qui s’est suicidé en se pendant à la chasse d’eau du domicile familial, ait des choses à lui dire.
L’intérêt pour la mort va aller croissant pour les deux enfants. Puis, le parcours de la vie faisant, ils finiront par se perdre de vue.
Un événement va pourtant les réunir à nouveau. Le Président de la République, M. Lucinder victime d’un attentat, va vivre une NDE (Near Death Experience) et entrevoir les abords du Paradis. Frustré d’avoir été rappelé par les vivants, il souhaite explorer le continent des morts, découvrir ce qu’il se cache au-delà lorsque l’homme passe de vie à trépas. Pour cela il va former une équipe de scientifique. Raoul et Michael seront les pionniers de ce territoire inconnu. Ainsi vont naître les Thanatonautes (terme venant de Thanatos – divinité de la mort – et Nautès – navigateur) qui peu à peu dresseront une carte géographique de ce monde si redouté par les vivants.

Premier livre d’un long cycle, « Les Thanatonautes » ouvre les portes vers un univers totalement inconnu. Qui ne s’est jamais posé La Question ? Qui n’a jamais cherché à savoir ce qu’il y avait au-delà ? C’est une nouvelle fois dans un voyage extraordinaire que Bernard Werber nous embarque. Au fil des expériences menées par les scientifiques, nous entrapercevons le monde qui peut nous attendre après. Et comme eux nous voulons toujours en savoir plus, pousser l’expédition toujours plus loin et voir enfin ce qu’il y a tout au bout.
« Les Thanatonautes » fait partie de ces livres, je ne vous le cache pas, qu’on a du mal à lâcher. Bernard Werber sait faire monter la pression, mais avec douceur et légèreté. Le sujet principal est abordé d’entrée de jeu, et pour l’envelopper l’auteur distille des touches de suspens, d’humour et de romance tout au long du récit. En plus de ce cocktail, l’auteur intègre, en parallèle à l’histoire, les points de vue et théories des différentes religions et courants de pensée par rapport au Paradis. Le résultat, un roman magnifique qui nous emmène en voyage pour une nouvelle destination.

« Les Thanatonautes », au-delà de nous faire passer un bon moment, est un livre qui nous pousse une nouvelle fois à la réflexion. Car bien plus qu’un créateur d’univers qui nous fait rêver, Bernard Werber sait mettre le doigt sur les questions existentielles que nous nous posons tous.
Mais qu’y a-t-il après la mort ?



Ed. Livre de Poche – 1994